L'autoproduction musicale ou production communautaire
Les réseaux sociaux sont très pratiques pour vous rappeler des choses que vous aviez mis dans un coin de votre tête ou tout simplement oublié : rappel d'anniversaires sur facebook, mise à jour du statut d'un "ami" qui ne poste pas si souvent qui vous fait penser qu'il vous faudrait prendre de ses nouvelles, ou qui vous donne une idée de billet pour votre blog.
C'est ce qui m'est arrivé récemment : un copain (oui, j'assume le côté un peu désuet du terme, particulièrement sur le net !) à moi sur facebook a créé il y a peu une association appelée La Ravine rousse, dont l'objet est tout simplement de produire un album, de l'enregistrement au salaire des techniciens, musiciens, au pressage de disque. L'enregistrement est programmé du 10 au 20 avril 2011.
Pour faire la promotion de cette association et du projet qu'elle porte, ce copain a écrit une série de lettres humoristiques. La première par exemple, qui a été adressée à Yoann Gourcuff, alors footballeur au club des Girondins de Bordeaux, lui racontait en substance que s'il voulait bien investir comme son ami payé 1500€ par mois l'avait fait 3,3% de son revenu mensuel, cela correspondrait à 2 fois la somme nécessaire pour la production du disque.
Dans la dernière lettre publiée (pour ceux de mes lecteurs qui seraient aussi fans que moi, d'autres lettres sont paraît-il prévues !), il répond à l'offre commerciale de rachat de son "entreprise" faite par une société spécialisée dans les transmissions d'entreprise...Son association n'ayant pas d'autre objet que la production associative d'albums musicaux sans autres bénéfices escomptés pour les adhérents qu'une réduction de 2€ sur un album vendu 5€ au "grand public"... il a saisi avec style l'ironie de la situation !
Je m'arrête là sur cette initiative, le but de ce billet n'étant pas (qui a dit "uniquement" ? ) de la promouvoir mais de réfléchir à travers elle aux modes alternatifs de production musicale, ou autoproduction, production communautaire, ...Mais jetez un coup d'oeil à son blog et à ses lettres, vous ne le regretterez pas ! Et si vous regrettiez, venez me pourrir en commentaires !
D'après mes recherches "internétiques" pour écrire ce billet, ce type précis de production communautaire, qu'on pourrait appeler du mécénat 2.0, est plutôt exceptionnel dans le sens où le but principal est simplement d'offrir à tout le monde une oeuvre artistique, pas de devenir riche et célèbre ; bref, cette démarche est une démarche utopiste que personnellement je qualifierais de grand bol d'air frais dans notre société dominée aujourd'hui par le "seul, l'unique, le meilleur" modèle économique qu'est le libéralisme et par le libre-échangisme qu'il sous-tend.
Après le bol d'air frais, et afin de ne pas passer pour un dangereux révolutionnaire dès mon 3e billet (oui, j'ai prévu de faire ce coming-out lorsque j'aurais quotidiennement plus de 500 visiteurs uniques, ça nous laisse de la marge ), examinons donc les autres modes d'autoproduction, production 2.0, etc.
La SCOP culturelle
Une SCOP ou société coopérative et participative est une forme spécifique de société commerciale ; ce peut être une société anonyme (SA), ou bien une société à responsabilité limitée (SARL). Comme la plupart des formes d'organisation sociale qualifiées de sociétés (oui, bon, je ne suis pas privatiste de formation, encore moins droit-des-affairistes, et je ne veux pas trop dériver du sujet de ce billet, qui n'est pas "la "société" : forme juridique d'organisation sociale" !) la SCOP tend à dégager des bénéfices.
Cependant, malgré tous les points communs qu'elle possède avec les autres formes de sociétés, elle est organisée suivant certains principes particuliers :
- Contrôle démocratique et primauté de l’Homme sur le capital : "1 personne = 1 voix"
- Propriété collective
- Impartageabilité des réserves
- Solidarité
- Liberté d'adhésion
- Juste répartition du profit
Pour le sujet qui nous occupe ici, c'est la part de l'entreprise que doivent obligatoirement détenir les salariés qui est intéressante.
Appliquée à la production musicale, cela implique que les financeurs du projet culturel (je traite ce billet sous le seul angle de la production musicale, par facilité assumée. Les différences avec les autres activités culturelles peuvent très certainement justifier des adaptations) vont :
- Pouvoir retirer des bénéfices du projet,
- Pouvoir influer sur le projet.
Ces deux caractéristiques de la "SCOP culturelle" plaident pour les dénominations "production participative" et "production communautaire", voire pour faire ici preuve d'innovation "production participative et communautaire".
En effet, une telle structure s'apparente bien à un groupement de personnes appartenant à un groupe ayant des intérêts communs (une "communauté"), dans le cas qui nous intéresse la réussite commerciale d'un album musical.
Avec un tel type d'organisation, la coproduction peut même devenir co-création selon l'importance de l'influence des adhérents sur le projet. Ca peut donc aller jusqu'à des modifications de la partition, l'orientation du style musical vers une "niche" musicale (ou niche commerciale ?).
Le "label indépendant"
Dans le modèle précédent, comme dans celui de mon copain, il existe encore une part d'affect ; l'exercice est lié à un projet particulier, à un(e) artiste particulier(ère).
Mais ces modes alternatifs de production musicales, qui après avoir connu le boom de la nouveauté pourraient quand même perduré dans l'avenir (pour les plus sérieux évidemment), peuvent aussi amener à la constitution de nouveaux labels indépendants, financés soit entièrement soit pour partie par des internautes investisseurs mélomanes.
On peut facilement concevoir un label qui après avoir opté pour un certain style musical, adopté une "charte" d'engagements (par exemple exprimant sa volonté de ne produire que ceux à qui l'on n'auraient jamais donné leur chance, ou que des artistes payant leurs impôts en France xD, ...), ouvrant la moitié de son capital à des internautes.
Ceux-ci en investissant dans ce label pourraient poursuivre deux objectifs, dont l'un commun aux investisseurs du monde entier : gagner de l'argent, et l'autre minoritaire la plupart du temps : obtenir une satisfaction éthique !
Ceci était un billet utopiste !!